Les quatre trésors du cabinet du lettré

Tous les lettrés se doivent d'être d'excellents peintres et calligraphes. Même si aujourd'hui la tradition se perd, les artistes continuent de respecter la règle d'or : tout lettré doit posséder un matériel irréprochable comprenant le pinceau, le papier, la pierre à encre et l'encre ; c'est ce que l'on appelle les quatre trésors du cabinet du lettré. Sans cela, nul ne peut s'attribuer le titre de lettré, de peintre ou de calligraphe.

Le pinceau

Cela fait quatre ou cinq millénaires que les Chinois ont découvert l'utilisation du pinceau. Bien que le stylo et le crayon remplacent aujourd'hui le pinceau dans la vie courante, les peintres et calligraphes chinois conservent la tradition ancestrale.

Le manche est en bambou ou en bois et les poils d'animaux sont minutieusement sélectionnés. En effet, pour un pinceau de qualité, chaque poil va être choisi individuellement. C'est après plus de soixante-dix étapes que le pinceau sera enfin finalisé.
Les pinceaux en poil de mouton, de lapin et de belette sont les meilleurs que l'on puisse trouver. Bien que l'on en trouve dans toutes les villes de Chine et qu'il soit même possible de les confectionner soi-même, les meilleurs pinceaux du pays sont réalisés à Huzhou, dans le Zhejiang. Dans cette ville, plus de 200 variétés sont disponibles, toutes plus remarquables les unes des autres.

Le travail au pinceau est extrêmement difficile. L'objet en lui-même est une œuvre exceptionnelle mais l'art de manier le pinceau l'est encore plus. Sans toucher la feuille, le lettré donnera du relief à son dessin ou sa calligraphie. En effet, avec sa pointe en forme de cône, les traits varient sur le papier en fonction de la pression infligée depuis l'autre extrémité du bambou.

L'encre

Qui dit calligraphie et peinture chinoise, dit encre chinoise. Cela pourra surprendre les novices, mais l'encore chinoise traditionnelle se trouve sous la forme de bâtonnet noir. En effet, l'encre est en fait une sorte de pâte qui, une fois mélangée à l'eau, devient liquide et peut alors être utilisée pour les arts du lettré. Ce mélange de suie et de résine, une fois bien pressé, donne naissance à cette encre unique.

Les inscriptions sur les carapaces de tortues et les os nous prouvent que l'encre chinoise était déjà utilisée à la préhistoire. Les techniques ont bien sûr évolué et c'est à Huizhou, dans l'Anhui, qu'elles ont atteint la perfection. Cela fait donc plus de mille ans que Huizhou produit une encre exceptionnelle dont le noir est très profond et même odorant !
En plus des aromates qui peuvent être ajoutés au moment de la confection, on retrouve parfois des substances précieuses telles que l'or ! Même si aujourd'hui, les Chinois se facilitent souvent la tâche en achetant de l'encre liquide, le bâtonnet d'encre chinoise est préféré de tous les artistes. Sa couleur mais aussi sa conservation le rendent exceptionnel puisqu'on peut le garder plusieurs dizaines d'années !

La pierre à encre

La pierre à encre, ou encrier chinois, est toute aussi indispensable au lettré chinois que le papier, le pinceau ou l'encre. C'est d'ailleurs le seul trésor du lettré qui peut vraiment être transmis de génération en génération.

Ce petit récipient en pierre est bien souvent sculpté pour devenir une œuvre d'art. Mais, c'est surtout son utilité qui lui donne toute sa valeur. Le lettré ne se déplace jamais sans ses quatre trésors et la pierre à encre en fait partie. Autrement, comment pourrait-il rendre le bâtonnet d'encre liquide ?
Il décide lui-même de la quantité d'eau et de bâtonnet d'encre à mélanger sur la pierre afin d'obtenir l'épaisseur voulue d'encre.

C'est à Duanxi que l'on trouve les meilleures pierres à encre de Chine. Mais pourquoi une pierre est-elle mieux qu'une autre ? Et bien, les pierres de Duanxi, mais aussi de Shezhou, Taohe et Chengni permettent non seulement de préparer l'encre rapidement, mais aussi d'empêcher celle-ci de sécher ou geler trop vite.

Le papier

Le papier, qui est l'une des inventions les plus importantes de la civilisation chinoise, a bien des utilités. Sans cette découverte extraordinaire, on en serait peut être encore à l'écriture longue et fastidieuse sur papyrus !
Pour un artiste tel que le peintre ou le calligraphe, le papier est un matériel indispensable, et sa qualité est très importante. Vous ne vous imaginez pas écrire sur du papier brouillon ? Et bien, le lettré chinois ne s'y risquera pas une seconde. Avec le développement des procédés et techniques de fabrication du papier, la Chine atteint rapidement des sommets.
Sous la dynastie des Tang, un papier fin, d'un blanc éclatant, homogène, doux et solide à la fois et très absorbant voit le jour ; c'est le papier de Xuancheng (ville de la province de l'Anhui). Grâce à la découverte de ce papier, la peinture et la calligraphie deviennent un plaisir dont les œuvres perdureront pendant plus de mille ans ! En effet, extrêmement bien résistant au passage du temps et aux vers, nombre de splendeurs créées depuis cette époque sont encore admirées aujourd'hui !

Encore maintenant, le papier de Xuancheng reste le papier préféré pour la peinture ou la calligraphie chinoise. La ville accueille d'ailleurs tous les ans le festival des « quatre trésors du cabinet du lettré » afin de faire perdurer la tradition ! 

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